Coaching et covid : peut-on changer ce que l'on pense ?

Coaching et covid : peut-on changer ce que l'on pense ?

Quels sont les faits ?

Lors qu'une pandémie (une épidémie avec plusieurs foyers qui s'étend au monde entier) est déclarée, les états membre de l'OMS s'engagent à prendre des mesures sanitaires pour limiter la propagation du virus. Ces mesures consistent, entre autres, à contraindre les populations touchées à des restrictions et stocker des vaccins.

Les chiffres du CHU de Guadeloupe montraient la semaine dernière que 98% des patients en réanimation n’étaient pas vaccinés contre la Covid. La Guadeloupe compte environ 30% de taux de couverture vaccinale (soit 100 000 primo-vaccinés). Malgré les renforts en moyens et en personnel médical, l’île en situation sanitaire critique a vu le retour du confinement pour limiter les contacts entre les personnes et donc la propagation du virus. Une situation qui peut générer un fort inconfort émotionnel. Dès lors, on peut se demander quoi dire aux personnes qui ne veulent pas se faire vacciner.

Que dire aux gens qui refusent le vaccin ?

Il n’y a pas de réponse précise à cette question complexe. Tout dépend de la personne, de votre lien et des circonstances de votre conversation. Quand on veut comprendre ou aider l’autre, on ne cherche pas à convaincre mais à entrer dans une conversation où chacun peut expliquer ses motivations, ses croyances, et partager le cas échéant des sources qui pourront être discutées.

Les croyances sont des affirmations que nous pensons vraies et qui constituent notre vision du monde. Elles sont fondées sur nos expériences et constituent notre réalité psychologique, bien que certaines sont inconscientes. Les croyances peuvent être aidantes ou limitantes. En coaching, on choisit quelles croyances on veut garder ou abandonner pour atteindre un objectif, se conforter dans sa recherche identitaire, aligner ses actions sur ses besoins et valeurs. Le coaching est affaire de choix.

Ai-je raison de croire ce que je crois ?

Les croyances incluent les connaissances, qui sont des croyances vraies, mais aussi les idées reçues, qui sont nombreuses sur le Covid, comme le montre la page ci-dessous de l'OMS dédiée. Notre histoire, notre environnement, notre méconnaissance de la totalité des choses, les problèmes de gestion de la crise et de diffusion de l’information font que nous avons tous de bonnes raisons de croire ce que l’on croit et de penser ce que l’on pense.

https://www.who.int/fr/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019/advice-for-public/myth-busters

Le point de vue du coach

En parcours, la posture du coach (la position basse, l’empathie, le non-jugement, la précision...) permet d’être à l’écoute des croyances des coachés, quand la demande existe. Car force est de constater qu’une croyance en Guadeloupe, en sus de la défiance envers les médias et les décisions gouvernementales (désinformation, cafouillages, chlordécone, tourisme, traitements alternatifs, autoritarisme...), nourrit une peur du vaccin : le vaccin serait dangereux pour la santé; au mieux il modifierait le génome et celui de la descendance, au pire il tuerait au bout d’un an ou deux.

Quels outils utiliser en coaching devant ces croyances ?

Certains coachs, synchronisés et rodés au méta-modèle*, utilisent le même argument rhétorique que les personnes en demandant si d’après elles c'est le vaccin ou le virus qui tue le plus, afin de créer un écart de dissonance cognitive** chez celles qui ont un besoin de sécurité. On peut aussi faire le choix stratégique de se référer aux personnes qui ont des raisons d’être favorables au vaccin. En réalité, qu’est-ce que cette peur raconte des personnes ? La peur est imprécise, polymorphe, propre à chacun. On peut avoir "peur" des vaccins tout comme des personnes non vaccinées et potentiellement transmettrices de virus et de mort.

*Le méta-modèle consiste à détecter toutes les imprécisions dans le langage : généralisations, raccourcis, propos non fondés, abstractions, déductions abusives, etc. à utiliser avec modération sous peine de « faire exploser » la personne. **La dissonance cognitive est le début de la remise en question d’une croyance et l’acceptation d’une nouvelle : on envisage un nouveau point de vue sur les choses.

Une personne qui a peur est en résistance. Il y a une dissonance entre sa réalité et ce qu’elle veut devenir. Le coach doit garder en tête que quand on résiste au changement, c’est parfois que quelque chose se met en place : la personne voit ce qui arrive. Le travail consiste à lui faire prendre conscience de ses croyances limitantes pour répondre à son besoin de maîtrise et de regard sur soi ; puis d’accueillir ses émotions.

En effet, la personne peut avoir besoin de temps ou mettre en place des stratégies pour essayer de réduire la dissonance (voir les travaux de Léon Festinger) pour faire coller la nouvelle réalité à la sienne en disant des choses comme « j’attends de voir ce que ça va donner » ou « ce n’est pas si grave, on peut continuer comme ça (c’est la sélection naturelle) ». Selon sa capacité à s’adapter, il va (ou pas) se remettre en question.

Par ailleurs nous savons que l’adoption ou le changement d’une croyance peut se faire en réaction à :

  • une seule expérience si celle-ci a un impact suffisamment fort (positif ou négatif), par exemple si un proche a changé d’avis, s’est fait vacciner et s’en porte bien – ou à l’inverse, si un autre non vacciné est mort des suites du Covid.
  • des expériences répétitives produisant un effet cumulatif : par exemple le nombre de personnes vaccinées qui sont toujours vivantes et normales après un an, après deux ans, ou la réduction des mesures et problèmes sanitaires chez les populations mieux vaccinées tandis que nous sommes toujours restreints dans nos déplacements.

Nous savons aussi qu’une fois qu’une personne a adopté une croyance, elle a tendance à perpétuer celle-ci en filtrant ou en déformant ce qui ne concorde pas avec. Elle maintient ainsi la cohérence de sa vision du monde et préserve son équilibre.

En termes d’intelligence émotionnelle, une compréhension des mécanismes qui sous-tendent nos doutes, nos peurs et nos colères ainsi que la courbe de deuil peuvent permettre l’acceptation émotionnelle de nouvelles croyances, surtout lorsque celle-ci s’accompagnent d’isolement ou de désenchantement ; afin de devenir libération.

Un article qui m’a aidé à y voir plus clair : https://theconversation.com/que-repondre-a-ceux-qui-hesitent-a-se-faire-vacciner-contre-la-covid-19-153131

Personnellement et plus largement, j’ai aimé apprendre (en podcast) de cette conversation sur la bienveillance et le scepticisme dans la relation d’aide : https://www.metadechoc.fr/stream-3-bienveillance-scepticisme

#coaching #covid #guadeloupe

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